La nouvelle entreprise individuelle favorise encore davantage la création d’entreprise

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Plus simple et plus protectrice : lors d’un récent webinaire, Pascal Ferron, Vice-Président de Walter France et Fondateur de MonEntrepriZ, logiciel pour les micro-entrepreneurs, et Christophe Alberola, Directeur juridique de Walter France, ont explicité les avantages que présente la nouvelle entreprise individuelle, telle qu’elle a été votée en 2022, pour les entrepreneurs en herbe et aussi les autres.

En France, la volonté de devenir entrepreneur est très forte : près de 42 % des jeunes ont envie de créer leur propre entreprise. Les créations d’entreprise ne cessent d’augmenter en France depuis plusieurs années, y compris pendant la période Covid : 548 000 en 2020, 641 000 en 2021. Leur première motivation est la liberté et l’indépendance. A l’inverse, les freins sont essentiellement la complexité des démarches, le financement et la méconnaissance des aides.

Qui sont les indépendants ?

Commerçants, artisans, professions libérales, professions intermédiaires, exploitants agricoles... le paysage des indépendants est extrêmement varié. Ils représentent à ce jour une population d’environ 3,7 millions de personnes. 80 % d’entre eux travaillent à temps plein, cassant ainsi le mythe selon lequel les indépendants seraient des travailleurs précaires. Pas du tout ! C’est une tendance lourde et en moyenne, les indépendants gagnent mieux leur vie que les salariés, et leur niveau de patrimoine est deux fois plus élevé que la moyenne des ménages. La parité n’est pas encore atteinte : une femme sur trois est indépendante alors qu’une femme sur deux est salariée.

Si l’on compare la France à d’autres pays européens, la marge de manœuvre est importante. Sur les 28 pays de l’Union européenne, les indépendants représentent 14 % de l’emploi total : 30 % en Grèce, 22 % en Italie, 15 % au Royaume-Uni et 11 % en France qui arrive tout de même devant l’Allemagne (10 %).

Des améliorations de ce statut avaient déjà été introduites

Ces dernières années, un certain nombre de mesures avaient déjà été prises pour améliorer le statut des indépendants : les charges sociales avaient été allégées ; les démarches encore simplifiées ; il était devenu possible de souscrire l’ATI (allocation pour les travailleurs indépendants), l’équivalent d’une allocation chômage ; et les seuils de chiffre d’affaires en deçà desquels il était possible de conserver le statut de micro-entrepreneur, avec une fiscalité et des charges sociales allégées et simplifiées, avaient été doublés : à 72 600 euros pour les prestations de services et à 176 200 euros pour les achats et ventes de biens.

Ce qui a changé depuis février 2022

Avant cette loi du 14 février 2022, les personnes ne voulant pas créer de société avaient le choix entre l’entreprise individuelle et l’EIRL (entreprise individuelle à responsabilité limitée) qui permettait notamment d’affecter une partie de son patrimoine à son activité professionnelle. Mais l’EIRL n’avait pas vraiment connu le succès depuis sa création récente.

La loi a voulu simplifier et unifier les régimes en apportant également une meilleure protection aux nouveaux entrepreneurs.

Désormais, l’EIRL est supprimée (depuis le 15 mai 2022). Les EIRL qui avaient été créées avant la loi subsistent, avec la possibilité de changer de régime, et toutes les entreprises individuelles préexistantes basculent automatiquement dans le nouveau régime. Avec un bémol : les entrepreneurs individuels qui avaient créé leur activité précédemment ne pourront pas bénéficier du nouveau régime de protection automatique de leur patrimoine vis-à-vis des créanciers.

La limitation de responsabilité

C’est la grande nouveauté. Auparavant, l’entrepreneur individuel ne pouvait déjà plus être saisi de sa résidence principale et il pouvait affecter une partie de son patrimoine personnel à son activité professionnelle. Il réduisait ainsi son risque ; il devait toutefois pour cela être pro-actif en prenant l’initiative de faire enregistrer ces biens auprès d’un notaire afin que celui-ci établisse une déclaration d’insaisissabilité. Dans la pratique, la plupart du temps, les chefs d’entreprise ne faisaient pas cette démarche souvent méconnue et assurément un peu complexe.

Avec cette nouvelle loi, la responsabilité des chefs d’entreprise se trouve limitée de droit (automatiquement) aux biens professionnels. Ils n’ont pour cela aucune démarche spécifique à effectuer. La protection de leur patrimoine privé est donc renforcée pour tous sans exception.

L’impossibilité de se porter caution

Autre mesure importante : le chef d’entreprise n’aura pas le droit de se porter caution d’une dette, notamment bancaire. Cette mesure s’inscrit dans la logique de la loi, qui cherche à le protéger de lui-même : en se portant caution personnellement, de fait, la limitation de la responsabilité disparaît. Toutefois attention, c’est une mesure à double tranchant ; en effet, on peut supposer que les banquiers hésiteront à prêter de l’argent sans caution. Ils pourront sans doute être tentés d’inciter le chef d’entreprise à passer en société.

Il existe néanmoins une procédure particulière aboutissant ponctuellement, sur demande écrite d’un créancier (futur dispensateur de fonds), au relèvement de la responsabilité limitée de l’entrepreneur individuel, à la condition que celui-ci y renonce expressément en respectant un formalisme très encadré.

A noter tout de même, la responsabilité du chef d’entreprise continuera à être engagée en cas de manœuvres frauduleuses ou en cas d’inobservation grave et répétée de ses obligations fiscales.

Pour définir ce qui appartient au patrimoine professionnel et au patrimoine personnel, le bilan fera foi : tout ce qui sera inscrit au bilan comptable sera considéré comme professionnel.

La possibilité d’opter pour l’IS : une grande nouveauté !

De droit, l’entrepreneur qui crée une entreprise individuelle est soumis à l’impôt sur le revenu, mais il peut désormais opter pour l’impôt sur les sociétés. L’avantage ? En tant qu’entrepreneur individuel, il a obligatoirement le statut social de TNS (travailleur non salarié). Il pourra donc moduler ses revenus et les optimiser fiscalement en jouant sur la répartition entre sa rémunération et la distribution de dividendes. En effet, lorsqu’il est soumis à l’IR, la totalité de son bénéfice est considéré comme étant son revenu, et il doit donc payer des charges sociales sur l’intégralité de ce montant. A l’IS, il peut se verser une partie de son bénéfice sous forme de dividendes. Une question reste toutefois en suspens : une partie des dividendes sera-t-elle considérée comme devant être assujettie au forfait social ? Pour mémoire, dans les SARL, la partie des dividendes versée au-delà de 10 % du capital social est soumise à charges sociales. De futurs décrets doivent venir préciser ce point.

Rappelons par ailleurs que cette année, le taux de l’IS baisse à 25 %. Pour les dirigeants dont le bénéfice est important, l’option à l’IS est donc particulièrement intéressante, car ils ne subiront pas, sur la partie de leurs bénéfices qu’ils ne se prendront pas en rémunération, l’effet « escalier » de l’IR.

L’entreprise individuelle n’a pas de personnalité morale

Elle ne survit donc pas à son dirigeant, en cas de décès par exemple, ou de cessation d’activité. Elle peut bien évidemment être cédée, donnée, ou encore transformée en société, mais dans ce cas on retrouve un formalisme un peu lourd.

Comme pour toute création d’activité, le porteur de projet devra étudier les différentes possibilités qui s’offrent à lui avant de choisir sa forme juridique. S’il a pour ambition de croître rapidement et s’il envisage par exemple de s’associer, il aura tout intérêt à choisir dès le démarrage une forme sociétale. En revanche, s’il veut rester seul maître à bord avec des formalités simplifiées, l’entreprise individuelle est faite pour lui.