Le rôle du commissaire aux comptes dans la lutte contre les retards de paiement (enfin) renforcé

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norbert-rocourt2Les éclairages de Norbert Rocourt, Vice Président délégué de la CRCC de Paris.

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Pris pour l'application de l'article 123 de la loi Hamon, le décret n° 2015-1553 du 27 novembre 2015 modifie les informations sur les délais de paiement fournies dans le rapport de gestion des sociétés dont les comptes annuels sont certifiés par un commissaire aux comptes : que change ce texte pour les entreprises et les commissaires aux comptes ?

Tout d’abord, il faut rappeler que ce décret est relatif à l’article L441-6-1 du code de commerce suite à la loi Hamon de mars 2014, l’objectif étant d’améliorer le délai de paiement « inter-entreprises ». Désormais, les entreprises ont l’obligation de mentionner les informations sur les délais de paiement pour les fournisseurs et les clients, pour les sociétés dont les comptes annuels sont certifiés par un commissaire aux comptes.

Si le sujet était posé, il restait à prévoir les modalités d’application et notamment la manière de calculer ces délais de paiement, par les flux ou sur la base d’une « photographie » à la date de clôture. Le décret défini donc ces modalités. Il prévoit que les informations fournies dans le rapport de gestion les informations seront pour les fournisseurs : le nombre et le montant total hors taxe des factures reçues non réglées à la date de clôture de l’exercice dont le terme est échu ; ce montant est ventilé par tranches de retard et rapporté en pourcentage au montant total des achats hors taxe de l’exercice ; Pour les clients : le nombre et le montant total hors taxe des factures émises non réglées à la date de clôture de l’exercice dont le terme est échu ; ce montant est ventilé par tranches de retard et rapporté en pourcentage au chiffre d’affaires hors taxe de l’exercice. Il sera possible d’exclure les factures litigieuses ou non comptabilisées (concept angoissant pour le commissaire aux comptes !). Le commissaire aux comptes dans le cadre de ses vérifications spécifiques, examine les données fournies dans le rapport de gestion et atteste de leur concordance avec les comptes annuels et présentent leurs observations éventuelles (troisième partie du rapport). Si l’entreprise, de taille importante ou intermédiaire, ne respecte pas de manière significative à plusieurs reprises les délais légaux, le commissaire aux comptes sera tenu de saisir le ministère de l’économie.

Quel est plus généralement le rôle du commissaire aux comptes dans cette problématique des délais de paiement ?

Le législateur a voulu donner une mission de « vigilance » au commissaire aux comptes. Il faut noter que la problématique du crédit « inter-entreprises » est très importante. Le seul montant des retards de paiement atteignait 9,8 Milliards d’euros à fin 2013. (Bulletin de la banque de France du 4ème trimestre 2014).

Quelles sont selon vous les solutions pour remédier aux problèmes de trésorerie et donc aux difficultés des entreprises ?

La question est complexe. En effet, il y a l’effet « boule de neige ». Le retard d’un client entraine souvent une difficulté à payer ses fournisseurs, et par la même un retard de règlement. Ce que l’on peut observer, c’est que dans des secteurs, comme celui du transport ou de la vente d’un certain nombre de produits alimentaires, où les délais de paiement sont depuis très longtemps encadrés, contrôlés, et le défaut de leur respect sanctionnés, les délais de règlements sont meilleurs. On peut citer aussi le secteur public. L’Etat prévoit de réduire ses délais de paiement sur le quinquennat, « afin de parvenir à un délai de paiement de 20 jours en 2017 ».


Propos recueillis par Pascale Breton

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