Mohamed Laqhila : « L’expert-comptable doit être sensibilisé aux problématiques de la RSE »

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Mohamed-Laqhila-portraitA l’occasion de la table ronde organisée par l’ANECS Île-de-France le 13 février 2018 sur le thème : « Les missions liées à la RSE, enjeux et opportunités pour les experts-comptables », nous avons rencontré Mohamed Laqhila, Député des Bouches-du-Rhône et ancien responsable de la Commission développement durable et RSE au Conseil supérieur, qui a accepté de répondre à nos questions.

Les TPE-PME clientes des experts-comptables sont-elles véritablement concernées par la RSE ? Et si oui, comment ?

Pour l’heure, effectivement, les textes font que ce sont plutôt les grandes entreprises qui sont tenues à des obligations en matière de RSE : rédiger des rapports, etc. Mais cela a souvent des conséquences sur leurs clients, leurs fournisseurs, leurs filiales ou encore, leurs sous-traitants TPE ou PME.

C’est une question que l’on a souhaité, en tout cas, porter au niveau des experts-comptables depuis longtemps car tôt ou tard, toutes les entreprises devront produire des informations extra-financières.

Par exemple, s’agissant d’une TPE, une telle entreprise n’est pas fiable si elle ne trie pas ses déchets, si elle pollue, si elle ne respecte pas ses ressources humaines, si elle n’équilibre pas ses comptes. Je dirais donc que ces petites structures font de la RSE sans le savoir.

Ce que j’avais souhaité à l’époque, c’était accompagner les cabinets d’expertise comptable pour qu’ils s’engagent sur ces questions avec un outil que nous avions mis à leur disposition, afin d’entamer un dialogue avec les entreprises, quelle que soit leur taille et notamment les TPE et PME.

Quel est le rôle de l’expert-comptable en matière de RSE ? Quelles sont les missions qu’il peut apporter à ses clients TPE-PME sur cette thématique ?

J’ai toujours dit que l’expert-comptable était le médecin généraliste de l’entreprise. Il est vraiment au centre de tout, pas simplement de la comptabilité, de la fiscalité, ni aujourd’hui du numérique et de l’informatique. La RSE le concerne au premier chef.

Comme je le disais, les entreprises font de la RSE sans le savoir. Les structures qui tiennent de génération en génération le font parce qu’elles ont respecté les piliers, les fondamentaux de la RSE. Donc l’expert-comptable doit être lui-même sensibilisé à ces problématiques et appliquer les outils mis à disposition, notamment ce que j’ai appelé le diagnostic de la RSE du cabinet lui-même.

A l’heure où le Conseil supérieur prône la spécialisation et le conseil, pensez-vous que la RSE soit une orientation judicieuse pour les cabinets d’expertise comptable ?

Il faut que toutes les thématiques soient ouvertes aux experts-comptables, à charge pour eux ensuite d’investir un domaine plutôt qu’un autre. L’institution doit tout faire pour ouvrir l’ensemble des marchés à la profession. Il revient après à chacun de piocher la couleur qu’il souhaite, ou le mélange de couleurs.

Mais ce n’est pas la vocation de l’Ordre que de spécialiser les professionnels. Et l’expert-comptable, je le redis encore, est un généraliste. Ensuite, qu’il spécialise des équipes en fonction de la taille du cabinet ou de ses propres intérêts, pourquoi pas ? Certains experts-comptables aujourd’hui sont très investis dans la RSE. Mais attention à ce que ce ne soit pas l’institution qui spécialise.

Dernière question d’ordre plus général : vous êtes également Député des Bouches-du-Rhône. Ce mandat est-il l’occasion de mieux faire entendre la voix des professionnels du chiffre – sur des dossiers comme le PACTE par exemple – ou bien restez-vous sur un positionnement politique plus neutre ?

Chaque député arrive avec ses propres bagages, culturels, intellectuels, professionnels… C’est sûr que dans la Commission des finances, sur des sujets comme la fiscalité par exemple, un parlementaire, notaire de profession, comprend un peu plus, peut-être, qu’un autre qui serait professeur de lettres ou d’histoire. Cela me paraît naturel.

Il est vrai que j’ai ma propre culture, je continue quand même à exercer. Et face à des textes qui sont plutôt compréhensibles par l’expert-comptable, des textes assez compliqués, c’est sûr que je suis un peu plus investi.

Propos recueillis par Hugues Robert

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