Interview Flat Tax : ce qui va changer pour les chefs d’entreprise

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laurent-weiss-expert-comptableLa loi de finances 2018 a prévu de nombreuses mesures impactant aussi bien la fiscalité des entreprises que celle de leurs dirigeants. Parmi elles, la mise en place d’une « Flat Tax » sur les revenus du capital. Laurent Weiss, expert-comptable et commissaire aux comptes, Directeur du bureau Sadec-Akelys de Troyes, a accepté de répondre aux questions du Monde du Chiffre sur cette Flat Tax et ses conséquences sur la situation fiscale des chefs d’entreprise.

En quoi consiste la Flat Tax ?

La Flat Tax concerne depuis le 1er janvier 2018 la taxation des revenus mobiliers tels que les dividendes, les intérêts à taux fixe, etc. Elle concerne également les plus-values mobilières, les plus-values de cession de titres.

L’idée de cette Flat Tax est de soumettre à un taux forfaitaire unique les gains réalisés sur ces opérations. Ce taux est de 30 %. Il regroupe l’imposition sur le revenu et la CSG-CRDS.

Quelles sont les conséquences de la Flat Tax sur les chefs d’entreprise ?

Les conséquences sont qu’aujourd’hui, nous disposons d’un mécanisme relativement facile à mettre en œuvre pour l’imposition notamment des plus-values.

Auparavant, jusqu’au 31 décembre 2017, les règles en la matière n’étaient pas très lisibles. La taxation était difficile à imaginer ou à concrétiser. Des abattements s’appliquaient sur les plus-values, des abattements de droit commun variant entre 50 et 65 % selon la durée de détention des titres et des abattements renforcés sous certaines conditions pouvant aller jusqu’à 85 %. Aussi, lorsqu’un chef d’entreprise vendait des titres de participation ou des titres de sa société, il était nécessaire d’effectuer une simulation selon la durée de détention, pour établir le résultat final.

Avec la Flat Tax, la situation devient beaucoup plus lisible. Il reste incontournable de déterminer la plus-value. Mais le calcul de la taxation consiste désormais en une simple application du taux unique de 30 %. Le dispositif gagne en simplicité et en visibilité.

Il est cependant important de noter que le texte prévoit la possibilité d’opter pour la taxation des revenus concernés selon les anciennes règles, il y aura donc des simulations à effectuer.

Y a-t-il des risques de dérives à prévoir avec cette nouvelle mesure ?

Le risque éventuel est que les chefs d’entreprise s’orientent davantage vers une rémunération sous forme de dividendes plutôt que sous forme de salaires, au motif que les premiers pourront être moins taxés que les seconds.

Il y aura peut-être des calculs d’opportunité au profit des dividendes, ce qui aura notamment pour effet d’assécher quelque peu les caisses en termes de couverture sociale.

Comment la mesure prévoit-elle d’éviter cet écueil ?

A priori, la mesure ne prévoit aucun dispositif pour éviter cet écueil.

Il a été jugulé dans le passé, de façon trop brutale à mon sens, concernant notamment les professions libérales puis les SARL, en soumettant à cotisations sociales tous les dividendes au-delà de 10 % du montant cumulé du capital et des comptes courants. Mais cette règle n’existe pas dans les autres formes de sociétés. Par exemple, elle ne s’applique pas aux rémunérations des présidents de SAS, ce qui, soit dit en passant, crée une inégalité de traitement…

Donc, nous verrons si ce risque identifié se vérifiera ou non, ou si le législateur n’imposera pas du coup certains garde-fous, en établissant par exemple des cotisations sociales qui viendraient polluer la lisibilité du nouveau régime.

Propos recueillis par Hugues Robert

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