Quels changements si vous souhaitez verser la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat à vos salariés en 2020 ?

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Une tribune de Giovanni Terrana, Associé RSM.

Dans le cadre de la loi n° 2019-1446 du 24 décembre 2019 de financement de la sécurité sociale pour 2020, le gouvernement a décidé de reconduire cette année encore la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat. Rappelons que cette prime avait été créée la première fois à la fin de l’année 2018 en réponse à la crise des « gilets jaunes ».

Les entreprises peuvent donc à nouveau décider de verser à leurs salariés une prime exonérée d’impôts et de charges sociales dans la limite de 1 000 euros. Toutefois, pour bénéficier de ces exonérations, des conditions nouvelles doivent être respectées, sous peine de subir un redressement Urssaf.

En premier lieu, il convient de souligner trois grands changements par rapport à 2019 :

  • l’exigence de disposer d’un accord d’intéressement (conclu conformément aux articles L. 3311-1 et suivants du code du travail) en vigueur au moment du versement de la prime sauf exceptions (principalement les associations et fondations à but non lucratif reconnues d’utilité publique) ;
  • une période de versement plus longue (du 28 décembre 2019 jusqu’au 30 juin 2020) ;
  • l’absence de prééminence d’une des modalités de mise en place de ladite prime par rapport à l’autre, ce qui ouvre une liberté de choix entre opter pour une décision unilatérale ou un accord collectif de travail jusqu’au 30 juin 2020.

En second lieu, des ajustements techniques ont été apportés quant aux conditions tenant aux salariés éligibles. En effet, ne bénéficient des exonérations sociales et fiscales que les salariés :

  • liés par un contrat de travail à l’entreprise à la date de versement de la prime (et non plus inscrits à l’effectif au 31 décembre). Soulignons à cet effet que les salariés intérimaires bénéficient désormais de la prime mise en place dans l’entreprise utilisatrice ;
  • ayant perçu une rémunération brute inférieure à trois fois la valeur du Smic annuel au cours des douze mois précédant le versement de la prime (et non l’année civile comme dans le schéma ancien).

Il résulte également de ce principe qu'une prime versée à un salarié ayant perçu une rémunération supérieure ou égale à trois fois le Smic annuel sera totalement soumise à charges sociales et imposable. Par ailleurs, outre la nécessité de formaliser à nouveau par accord d’entreprise ou par décision unilatérale de l’employeur, précisons qu’une modulation du montant de la prime en fonction de critères (désormais limitativement énumérés par la loi) reste possible. Enfin, il est impératif de veiller comme en 2019 au principe de non substitution de la prime avec tout autre élément de rémunération prévu par accord de branche ou d'entreprise, le contrat de travail ou un usage.

En conclusion, reste à savoir si les entreprises (et plus particulièrement les TPE) s’empareront de ce dispositif version 2020. En effet, il reste certes toujours attractif eu égard à son régime social et fiscal de faveur sans équivalent à l’heure actuelle. Mais, compte tenu notamment de l’exigence de disposer d’un accord d’intéressement, il est à craindre que les TPE ressentent cette condition supplémentaire comme une contrainte rédhibitoire.

En réponse aux nombreuses critiques sur cette condition supplémentaire lors du dépôt du projet de loi en 2019, le gouvernement a accordé une concession aux entreprises, en leur permettant de limiter la durée d’application de l’accord d’intéressement à un an (contre trois en principe) pour les accords conclus entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2020. Toutefois, cette concession pourrait ne pas être suffisante pour renouer avec le franc succès qu’a connu en 2019 la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat.

Giovanni Terrana, Associé RSM