Vers une évolution des missions de la profession comptable

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Dans une jungle chaque jour plus dense de règles, d’obligations et d’aides en tous genres, les chefs d’entreprise, les commerçants et les artisans ont besoin d’un guide. Ce guide, l’expert-comptable est en situation idéale pour le devenir : il a une relation de proximité et de confiance avec le dirigeant, il connaît parfaitement la situation de son entreprise et il a acquis au fil de ses missions une précieuse expérience dont il peut lui faire bénéficier.

Bien que la tenue de comptabilité et l’établissement des déclarations sociales et fiscales constituent encore la majeure partie des revenus de la profession, les experts-comptables élargissent ainsi de plus en plus la palette de leurs compétences afin de pouvoir accompagner et conseiller leurs clients sur tous les aspects de la vie de l’entreprise : stratégie de développement, financement, ressources humaines, numérique, politique environnementale… D’autant plus que désormais, la loi encourage l'évolution de la profession.

Décriée par une partie de la profession pour avoir relevé au niveau européen le seuil d’intervention des commissaires aux comptes, la loi PACTE de mai 2019 offre aux experts-comptables trois avancées majeures, qui devraient accélérer la mutation de la profession vers davantage de conseil.

Le mandat de paiement

En premier lieu, la loi permet désormais aux experts-comptables de procéder au paiement des fournisseurs et au recouvrement amiable de créances pour le compte de leurs clients. La reconnaissance de ce mandat de paiement signifie qu’il sera possible aux experts-comptables de décharger entièrement les entreprises de leur fonction administrative et financière et de devenir en quelque sorte leur directeur financier externalisé.

Les compétences spécialisées

Autre nouveauté de la loi PACTE, les cabinets d’expertise comptable peuvent dorénavant afficher jusqu’à trois compétences spécialisées, techniques (cession-acquisition, conseil patrimonial…) ou sectorielles (BTP, immobilier…). Ces compétences sont individuelles et doivent être reconnues par le Conseil régional de l’Ordre des experts-comptables. En particulier, les experts-comptables pourront faire valoir leurs connaissances dans les domaines du numérique et de la responsabilité sociale et environnementale (RSE), ce qui leur permettra d’épauler leurs clients, souvent démunis face à ces enjeux pressants et complexes.

Les honoraires de succès

Enfin, la loi PACTE introduit la possibilité pour les cabinets de facturer des honoraires de succès (success fees) en complément des honoraires de diligence usuels. Assujetti à la réalisation d’objectifs chiffrés, ce mode de rémunération ne peut être appliqué aux prestations relevant de la prérogative d’exercice exclusive, mais il est en revanche bien adapté pour des missions à l’issue incertaine : recherche de financement, cession ou acquisition, réduction des coûts (hors postes sociaux et fiscaux)… À manipuler avec prudence pour éviter tout conflit d’intérêts, les success fees vont permettre aux cabinets de faire valoir leur contribution à la création de valeur… et d’en toucher les dividendes.

Toutes ces évolutions vont dans le même sens de donner aux experts-comptables la possibilité de proposer de nouvelles prestations à valeur ajoutée. Elles leur ouvrent une large fenêtre d’opportunités au moment même où les entreprises expriment un fort besoin de conseil. Selon une étude réalisée en 2018 par l’institut CSA pour l’Ordre des experts-comptables, elles sont par exemple 38 % à déclarer avoir du mal à trouver de l’aide pour recruter et 23 % dans le domaine juridique et social. La transformation digitale, la dématérialisation, le télétravail et la cybersécurité suscitent également des demandes importantes. En se positionnant sur ces sujets, les experts-comptables peuvent renforcer leur rôle de partenaires des entreprises tout en faisant du conseil un relais de croissance significatif pour les cabinets.

Angélique Ribas, Yooz

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