BDO France et la facture électronique : « Nous nous préparons déjà depuis longtemps à cette réforme »

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Le sujet de la facture électronique devient de plus en plus central pour les professionnels du chiffre et du conseil. Quelle est la stratégie concrète du cabinet BDO France en la matière ? On en parle avec Laurent Lamoureux, Associé, Directeur métier expertise comptable et membre du Comex de BDO France.

Quels sont selon vous les enjeux de la facture électronique pour les professionnels du chiffre et du conseil ?

La partie visible de l’iceberg, c’est l’obligation pour les entreprises d’émettre des factures en format électronique entre juillet 2024 (pour les plus grandes) et janvier 2026. Toutes les entreprises devront avoir la capacité de recevoir dès juillet 2024. Les enjeux réels sont bien plus importants et structurants.

Le premier enjeu est que la grande majorité des entreprises va devoir changer ou faire évoluer ses outils comptables et financiers. Au-delà de l’émission et de la réception des factures électroniques, ces outils devront pouvoir stocker les informations relatives à ces flux et permettre une piste d’audit fiable. La mise en place de ces solutions devra impérativement s’accompagner d’une évolution des processus et d’un accompagnement au changement des équipes.

La conséquence pour les professionnels du chiffre est la perte de valeur du traitement des flux comptables. Avec l’arrivée de la facture électronique, la valeur ajoutée n’est plus dans la codification et l’enregistrement des pièces comptables. Le deuxième enjeu est de déplacer la valeur ajoutée en amont dans l’acquisition des datas, et en aval dans leur analyse et leur restitution.

Le dernier et nouvel enjeu est l’accès, grâce à la facture électronique, à de nouvelles informations extra-financières, permettant l’élaboration de tableaux de bord plus approfondis et pertinents pour les entreprises. Ces dernières auront accès à des données ESG bien plus larges et riches qu’aujourd’hui pour piloter leurs politiques RSE.

Comment le cabinet BDO France se prépare-t-il en amont de cette réforme d'envergure ?

Nous nous préparons déjà depuis longtemps à cette réforme.

Le premier axe est la formation de nos équipes et l’information de nos clients. Nous sommes présents dans les principaux groupes de travail des acteurs économiques sur le sujet. Nous avons aussi beaucoup sollicité notre réseau BDO (cinquième mondial) afin de partager l’expérience des pays digitaux depuis longtemps comme les pays scandinaves ou l’Amérique latine, et des pays ayant mis en place cette réforme récemment comme l’Italie. Ces échanges nous ont permis de comprendre les difficultés rencontrées par les entreprises lors de la mise en place de la facture électronique, mais aussi quels sont les rôles des professionnels du chiffre cinq à dix ans après l’adoption de cette réforme par un pays.

Nous souhaitons que cette évolution majeure soit un non événement pour nos clients. Ils doivent en sentir rapidement les bénéfices sans être perturbés par les contraintes de mise en œuvre. Cela veut dire que nos clients seront prêts avant le 1er juillet 2024. Nous venons de changer nos outils pour nos clients avec une approche segmentée par type et taille de client, afin d’apporter le meilleur service à chacun. Nous avons choisi des éditeurs qui seront PDP afin d’avoir les circuits les plus fluides et intégrés possibles. Nous avons aussi choisi des solutions résolument orientées vers les clients qui apportent des fonctionnalités et des services qui n’existaient pas sur le marché jusqu’à maintenant : une information financière à jour en temps réel, une interconnexion amont et aval avec tous les outils de l’entreprise, des circuits d’approbation digitaux, un accès permanent et simple via un smartphone, une néo-banque avec des moyens de paiement directement reliés à la comptabilité, et encore bien d’autres innovations que nos clients vont découvrir dans les prochains mois.

Il est aussi très important de pouvoir accompagner nos clients de plus grande taille, déjà équipés de solutions qui nécessitent de profondes mises à jour et-ou des applications complémentaires. BDO France a fait l’acquisition l’an dernier d’un intégrateur de solutions comptables et financières. Il était fondamental pour nous de regrouper toutes les compétences pour conseiller et aider de la meilleure façon nos clients.

Sur l'avenir, quels sont les projets de développement de BDO France en lien avec la facturation électronique ?

Les projets de développement en cours et futurs en lien avec la facture électronique sont aussi nombreux que passionnants. Ils concernent tous les métiers de BDO et confirment chaque jour la force et l’intérêt de notre multidisciplinarité. Le sujet n’est pas limité à la technologie. Nos avocats sont très impliqués sur les conséquences en matière de TVA. Nos équipes de conseil assistent au plus près nos clients dans leur transformation digitale : le meilleur outil du monde n’apportera rien si l’on conserve les process « papier » du précédent. La formation et l’accompagnement des équipes au changement est le point d’attention le plus fondamental, et la capitalisation des erreurs et difficultés rencontrées par les autres pays est un atout certain.

Enfin, l’adoption de la facture électronique nous permet de travailler sur toutes les informations extra-financières contenues dans ces factures. Notre rôle auprès de nos clients ne doit plus seulement se limiter à la production ou au contrôle de l’information financière statutaire avec un prisme « passé ». Les professionnels du chiffre doivent apporter à leurs clients de réels outils de pilotage tant pour le business que pour les enjeux majeurs de RSE. La facture électronique permettra d’assembler données comptables, données extra-financières et benchmark.

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